La Cour de Justice des Communautés européennes (CJCE) adopte dans son arrêt UTECA rendu le 5 mars dernier une vision respectueuse de la diversité des expressions culturelles. Interrogée par le juge espagnol, la Cour devait déterminer la validité d’une réglementation obligeant les télévisions à investir 5% de leurs recettes d’exploitation dans le financement de films et téléfilms européens et à affecter 60% de ces 5% à des œuvres de langue originale espagnole.
Ce système qui était contesté par les télévisions commerciales espagnoles, a été jugé par la CJCE parfaitement compatible avec la directive « Télévisions sans frontières » qui ne contient aucune disposition sur cet aspect précis du financement des productions et donne même aux Etats membres la faculté de prévoir des règles plus détaillées ou plus strictes dans les domaines qu’elle couvre. Le juge communautaire va plus loin : s’il souligne que la mesure relative à l’obligation d’investissement dans les œuvres de langue espagnole est contraire aux 4 grandes libertés du marché intérieur, il indique que la promotion de la diversité linguistique correspond à une raison impérieuse d’intérêt général justifiant une telle violation.
Il est à noter que la CJCE fait ici pour la première fois référence à la convention UNESCO pour la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles pour souligner que « la diversité linguistique est un élément fondamental de la diversité culturelle » qui ne doit pas nécessairement être assortie d’autres critères culturels pour [..] justifier une restriction à l’une des libertés fondamentales du Traité. Le juge communautaire fait ainsi montre d’une vision large de la culture et met en échec la thèse de la Commission qui, fidèle à sa tradition de contrôle très strict des aides d’Etat au cinéma, soutenait qu’il était nécessaire de fixer des critères pour s’assurer que ce financement était destiné uniquement à des « produits culturels ».