Le quotidien britannique The Guardian a publié début août une carte européenne des coupes dans les budgets de la culture. Elle présente les musées, les théâtres ou encore les universités dont le budget a été réduit à cause de la crise.
Ce projet, mené en collaboration avec cinq autres quotidiens européens (dont Le Monde), dresse ainsi un bilan alarmant de l’état de la culture en Europe.
D’un soupçon à la réalisation de la carte
Ils avaient déjà collaboré ensemble pour la réalisation de deux numéros spéciaux autour de l’Europe. Cette fois-ci, The Guardian, Le Monde, El Paìs, La Stampa, Gazeta Wyborcza et Süddeutsche Zeitung ont réuni leurs rédactions pour mettre en place un projet de « data journalism ». Grâce à l’outil informatique fourni par le moteur de recherche Google (la fameuse Google map), les internautes peuvent insérer dans la carte toutes les institutions culturelles dont les fonds ont été réduits pendant les derniers mois.
« Nous avions un soupçon, ici à la rédaction », raconte Mark Rice-Oxley, journaliste au Guardian et auteur du projet. « Depuis le début de la crise, les secteurs les plus touchés par l’austérité étaient l’administration publique et les services sociaux. Personne ne pensait au monde de la culture, mais il était pourtant très probable que dans ce domaine aussi les financements aient été réduits », s’explique M. Rice-Oxley.
En effet, les plans d’austérité approuvés partout en Europe consistaient très souvent en une réforme de la retraite, en une réduction des emplois publics ou encore en une baisse des salaires. Rarement, la presse avait mis en avant les conséquences de l’austérité dans le monde de la culture. Pourtant, les arts ne sont pas sortis indemnes de la crise.
« Pendant quelques semaines nous avons reçu plus d’un millier de contributions de la part des internautes », affirme Mark Rice-Oxley, « il s’agit d’un travail qu’aucune rédaction n’aurait pu faire sans s’appuyer sur les citoyens ». Les contributions arrivent de tous les coins d’Europe et aussi de certains pays qui ne font pas partie de l’Union européenne (comme par exemple la Suisse et la Bosnie). Pour collecter ce volume d’information, il aurait fallu des dizaines de correspondants éparpillés sur le continent.
Des données en cours d’analyse
La rédaction du Guardian n’a pas encore commencé à analyser les données soumises par les internautes. « La deuxième étape de ce projet consiste évidemment en la vérification et l’étude des données », affirme Mark Rice-Oxley. « Pour l’instant, il est difficile de tirer des conclusions précises, mais nous avons déjà remarqué des tendances intéressantes », poursuit le journaliste, « personnellement, je ne m’attendais pas à voir un nombre si important d’universités et d’écoles parmi la liste des institutions culturelles en difficulté. En outre, les internautes nous ont envoyé des commentaires très critiques contre leurs gouvernements. Souvent ils étaient carrément en colère et cela aussi m’a surpris ».
D’autres tendances visibles sur la carte restent pour l’instant sans explication précise. Dans certains pays par exemple le nombre des contributions est très bas. C’est le cas de la France,
de la Grèce et des plusieurs pays de l’Europe de l’Est. « Il est difficile de dire si cela reflète la bonne santé des institutions culturelles nationales ou si simplement il n’y a pas encore assez de contributions », commente M. Rice-Oxley.
En automne, la carte sera publiée dans le nouveau numéro de « Europa », le magazine spécial réalisé simultanément par les six quotidiens européens. Pour l’instant, et en attendant que le Guardian termine l’analyse des données, on peut déjà observer une carte de l’Europe décidément très alarmante.
En savoir plus
Culture cuts: where austerity measures are curtailing the arts – The Guardian
La Scala, ou la culture oubliée par le gouvernement italien – Touteleurope.eu
Crédit photo © burak çakmak – Fotolia.com